Les femmes africaines n’ont pas la partie facile : pourtant elles représentent, par leur travail acharné et leurs modes d’organisation astucieux, les premiers agents économiques et sociaux du continent noir.
Il vaut mieux naître femme en Afrique qu’en Asie.
Cette affirmation est toujours vraie. Mais aujourd’hui, ce sont les femmes qui, concrètement, tiennent les leviers de commande du continent. C’est tout le paradoxe du statut de la femme en Afrique.
Il se dit que naître femme dans une grande partie de l’Asie est une malédiction : en Inde, la femme souffre de discriminations à tous les âges de la vie… lorsqu’elle a la chance de pouvoir grandir.
Indiens et Chinois suppriment en effet à la naissance une partie de leurs petites filles car ils savent qu’ils devront acquitter une lourde dot pour pouvoir la marier et qu’elle quittera le foyer familial pour se mettre au service exclusif de ses beaux-parents. Avoir une fille revient à « arroser le jardin du voisin ».
La discrimination hommes-femmes explique qu’il y ait un excédent d’environ 60 millions d’hommes dans les deux seuls pays-continents que sont la Chine et l’Inde.
Rien de tel en Afrique. Bien sûr, évoquer « l’Afrique » sans autre précision peut sembler abusif, tant la diversité des situations, dans un continent qui regroupe 53 pays et 13 % de la population mondiale, est extrême, ne serait-ce qu’entre Afrique du Nord et Afrique subsaharienne, ou au sein de cette dernière, entre pays musulmans et chrétiens.
Néanmoins quelques tendances se dégagent, qui individualisent l’Afrique par rapport au reste du monde. D’abord, les populations africaines ne pratiquent généralement pas de discrimination selon le sexe de l’enfant, ni à la naissance, ni dans les premières années de la vie. La petite fille est aussi bien accueillie que le petit garçon (il est néanmoins important pour l’homme de mettre au monde des fils… comme partout ailleurs).
Les femmes : richesse du mari
Ensuite… les choses changent. C’est dans les campagnes que la situation des femmes est la plus difficile. D’abord, la fillette est moins envoyée à l’école : les mères ne voient pas l’utilité de scolariser une enfant qui est appelée, dès son plus jeune âge, à les seconder, en gardant les plus jeunes et en participant aux tâches domestiques, comme aller chercher l’eau ou s’occuper de la maison. Dès 4 ans, la petite fille est mise au travail. Quatre cinquièmes d’entre elles ne sont ainsi pas scolarisées. Avec leurs mères, elles pourvoient à l’économie de la cellule familiale.
Car la femme en Afrique est perçue comme une richesse. Contrairement à ce qui se passe en Inde, c’est le mari qui doit payer la dot aux parents de celle qu’il souhaite épouser. Et cette dot n’est pas négligeable. Elle est même souvent tellement lourde que seuls les hommes aisés ou âgés (ceux qui ont travaillé suffisamment longtemps pour réunir son montant) peuvent acquitter son prix, accaparant ainsi les femmes au détriment des hommes jeunes.
L’écart d’âge entre les époux est ainsi fréquemment très élevé. Il n’est pas rare que la jeune fille rejoigne avant même ses premières règles l’homme qui s’est mis d’accord avec ses parents pour l’« acheter ».
Pourquoi ce prix à payer ? Parce que, par ses épouses, l’homme acquiert une force de travail. Plus il a de femmes, plus le nombre de personnes qui travaillent à son service est important, plus il est riche et envié. Les femmes qui constituent son foyer accroissent sa surface économique et son prestige social.